JEAN-PIERRE RANSONNET

Les uniques bleus / N’y voir que du bleu
lundi 30 septembre 2019
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Galerie de Wégimont
Du 28 septembre au 3 novembre 2019
Vernissage le 27 septembre

 Les uniques bleus

Donnez-lui une photo, il y écrira des mots. Ramenez-lui l’Ardenne, et tout de suite ça peint. Donnez-lui des sapins, il y verra des visages. Elisez-lui un « l », aussitôt il l’apostrophe.
Donnez-lui un détail et débrouillez-vous avec ce qui manque. Dans son patronyme, un E pour un A.
Sur la toile, un bleu pour un jaune ? — on ne la lui fait pas. Mais passez-le au bleu, il vous y noiera bientôt.

D’une liste, il tire d’autres listes (ou l’inverse) ; d’une anecdote, un souvenir... ou l’inverse ; d’un trou, une mémoire ; d’un rebond ou d’un ricochet, un second rebond, un autre ricochet.
Ransonnet c’est le trait décoché. Le trait d’esprit et le trait de caractère. Le trait qui peint et le temps qui passe.
La tête et la main, suspendus, mais en mouvement perpétuel. Il joue avec tout ; il joue avec légèreté ; il joue avec inquiétude. Tout est ici relation et association, déplacement et allusion. Et puis aussi, et peut-être surtout, gravité et dérision, qui rejoignent chez lui l’éternelle dialectique de la surface et de la profondeur, de l’évidence du sens et de son évidement. Jean-Pierre Ransonnet ce n’est pas la pose songeuse, c’est la vraie peinture pensive. Et une trajectoire magnifique.
On n’en fera pas le tour ici. Plus de 400 pages y suffisaient à peine, dans l’imposante monographie que les éditions Yellow Now consacraient à l’artiste il y a une grosse poignée d’années déjà, et dans les textes fondateurs — ceux d’Alain Delaunois et de Julie Bawin en tête — qui ont contribué à identifier le créateur et à dresser les contours de son œuvre.
Que de temps depuis le temps des études, Liège, Saint-Luc... avant l’enseignement « en face », à « l’Aca ».
De la campagne à la ville, et retour... des lieux, des liens — et des L, déjà, comme dans les prénoms lumineux de ses deux géniteurs. La débrouille, la vie de peu, les espaces contraints et, très vite, des rencontres déterminantes : Lizène, Nyst, Charlier, Boulanger, Vandeloise, Blavier, Jungblut... Les liens dessinent des cercles où l’on se sent moins seul.

Derrière l’apparent désordre et le mélange des approches, des techniques, pointe rapidement la volonté tenace de projeter dans l’œuvre « les événements de la vie tels qu’ils viennent à la conscience », héritage bien digéré du surréalisme et de l’influence de Breton ou Bataille, qu’il effleurera souvent sans jamais tomber dedans.
La fin des années septante et les années quatre-vingt verront Ransonnet quitter les parages de l’art relationnel et les composantes narratives de son art, pourtant bien établies et devenues presque marque de fabrique, pour un retour massif à la peinture « pure », dans toute son inépuisable simplicité. Motifs évasifs, déclinaisons sérielles, obsessions et insistance, ou au contraire tentatives et variations ; renouvellement surtout, partout, sans cesse. Gonflé d’une belle mais peu tapageuse énergie, Ransonnet quitte le cadre alangui de la photographie et retrouve une vision du monde à la verticale, et le plaisir d’aborder la peinture comme le geste le plus debout qui soit.
Le goût de l’allusion et de l’élision ne l’a jamais quitté.
S’y devinent l’absence, le manque : un peu froissés, un peu fêlés, et donc laissant passer la lumière... la disparition dans le temps et l’espace mêmes de l’apparition. Et le temps d’un bleu (bleu de travail, bleu mental, bleu du ciel), tout alors se pose et vous hypnotise, vous happe dans l’eau de cette vie qui — quelque poète anglais l’aurait-il dit déjà ? — n’était peut-être qu’un songe, depuis le début ou même avant. Un songe ou mille, aussi indistincts qu’éblouissants.
Emmanuel d’Autreppe

 N’y voir que du bleu

Parbleu ! Pour cette exposition des œuvres de Jean-Pierre Ransonnet, il n’y a à voir que… du bleu, beaucoup de bleu, bleu clair, bleu foncé, bleu azur, bleu marine, bleu outremer, bleu nuit, bleu indigo, bleu de cobalt, bleu de Prusse… Couleur du ciel, de l’eau, de l’espace, le bleu entre toutes est la couleur de l’immatériel.
Il n’a pas de dimensions. Intense, profond, il exprime généralement la soif d’idéal, l’aspiration
au spirituel, la quête du divin. Dans sa légèreté et sa clarté, il nous parle de tendresse, de douceur, de rêverie, d’évasion. Obscurci, s’approchant du noir, le bleu sombre dans la mélancolie et se fait témoin de la solitude, de l’absence, de l’égarement, de la disparition… de la mort.
Du lapis-lazuli de l’Égypte ancienne au fameux « IKB » d’Yves Klein (1), le bleu traverse toute l’histoire de l’art. Sa tonalité varie en une multitude de nuances et porte autant de noms pour les décrire, mais il en manque au moins un qui ne figure ni dans les catalogues de fabricants de couleurs, ni dans les encyclopédies ou autres ouvrages et essais, d’histoire de l’art et d’esthétique. Ce bleu, c’est celui de Jean-Pierre Ransonnet, le bleu de « l’Ardenne bleue ». La Région wallonne a vu juste avec ses panneaux plantés sur les bas-côtés de notre magnifique autoroute des Ardennes. L’Ardenne, certes, est plutôt verte de prime abord mais plus on s’enfonce au cœur du paysage, plus les sapins se multiplient, grandissent, se serrent les uns contre les autres, et plus ils deviennent
bleus, d’un bleu profond, presque noir.
Ces sapins grandioses de « l’Ardenne bleue » ont frappé l’imaginaire de Jean-Pierre Ransonnet, enfant. Né à Lierneux, il y a vécu toute sa jeunesse. Fréquentant l’école buissonnière, il courait et jouait dans la campagne sauvage et dans les forêts immenses, mystérieuses. Mêlée aux souvenirs des membres de sa famille, de ses amis, des habitants du village, agriculteurs, forgerons, artisans, cette nature foisonnante mais rude et austère a façonné sa personnalité et constitué le terreau de son art.
(1) IKB : Intrenational Klein Bleu. Bleu composé et breveté par Yves Klein dont il possède dès lors l’exclusivité – non sans un brin de prétention et d’humour ?

PETIT RETOUR EN ARRIÈRE
Dans les années ’70, Jean-Pierre Ransonnet se détourne résolument de sa première tentative picturale néo-expressionniste.
Un besoin d’émancipation, un brin de provocation, beaucoup d’humour et de dérision mais aussi de tendresse et d’émotions se traduisent alors dans des œuvres sur papier (c’est aussi pour lui une époque de vaches maigres) où se mêlent dessins, gouaches, photos, collages, écritures. Dans ces constructions et assemblages débridés plane un esprit surréaliste où s’effectue la « rencontre fortuite » d’images du réel, de souvenirs présents et d’autres enfouis dans l’inconscient qui ressurgissent à la faveur d’un « hasard objectif », cher à André Breton. En fragments épars, les thèmes s’entrechoquent, souvenirs des lieux de son enfance, regards sur les faits et choses du quotidien, images de la femme entre idéal, désir, satire, érotisme et humour.
C’est aussi à ce moment-là qu’apparaît dans les œuvres de l’artiste, comme en surimpression, la lettre « l’ », calligraphiée, signe emblématique et signature de l’œuvre de Jean-Pierre Ransonnet.
Le « l’ » se glisse partout déjà dans les créations des années ’70 et réapparaîtra plus tard dans sa peinture. Tel un motif, ici bien apparent et lisible, là dissimulé, enfoui dans la matière, presque indéchiffrable ou encore, transfiguré en l’ébauche d’un visage. Le « l’ » renvoie à Lierneux, aux Lieux, aux Liens et l’apostrophe est elle-même un lien qui relie son village natal à d’autres lieux, où se sont noués les liens qui ont tissé sa vie et son œuvre. Ce « l’ », au gré de ses différentes incursions tout au long de l’œuvre de l’artiste, peut aussi se lire comme une interpellation, une interrogation, une hésitation, une échappée, une porte entrouverte, un appel, une attente, une absence…

D’abord, il n’y a rien, ensuite il y a un rien profond, puis une profondeur bleue. Gaston Bachelard

« ÇA PEINT »
Après cette période, disons néo-dadaïste pour balayer d’un trait, trop rapide, l’activité avant-gardiste des années ’70, Jean-Pierre Ransonnet revient à la peinture.
En 1979, lorsqu’il peint son premier Ça peint (lisez sapin), par ce jeu de mot d’une part, il renvoie à l’inconscient, au ça freudien et, d’autre part, il affirme son choix, sa volonté, son goût de peindre… plutôt à contre-courant de ce qui est alors dans l’air du temps.
Peindre, oui ! Mais quoi ? Et comment ? À cette question, dans les années ’60, bousculant toutes les théories artistiques et spéculations intellectuelles traditionnelles, le célèbre artiste et professeur allemand Josef Beuys apporte une réponse simple et claire : « l’art c’est la vie », autrement dit, répétait-il à ses élèves : « l’art, c’est toi, ce que tu es, ce qui t’a construit, ton histoire, ta mémoire, ta vie ». La règle : partir de là.
Sans toutefois appartenir à quelconque école, Jean-Pierre Ransonnet l’avait compris. Il est « parti de là », de l’Ardenne et de ses forêts de sapins immenses et sombres, là où il est né. Sur ses premières toiles s’inscrivent de grandes masses noires compactes, les sapins (Ça peint). Déployant leur ramure tombante, ils traversent l’espace de part en part, de gauche à droite, de bas en haut, de la terre au ciel, sans souci des limites du tableau. Quelques traits colorés (bleu, vert, jaune orangé et blanc), frêles trouées de fraîcheur et lumière entre les colosses obscurs, tourbillonnent en tous sens en jets nerveux, rapides, et saccadés. Bouillonnante expression à la fois dramatique et vitaliste de la présence et du mystère ancrés au plus profond de son être, de ces vastes forêts insondables et ténébreuses.

DU « ÇA PEINT » AUX SAPINS
Comme la meule de foin pour Claude Monet, le sapin est désormais devenu le motif sans cesse répété et varié de la peinture de Jean-Pierre Ransonnet. Les couleurs, vert, mauve, bleu, jaune ocre, brun rouge, s’emparent de sa ramure ou de son tronc. Glacis légers et pâtes épaisses, dégoulinures enchevêtrées aux couleurs accordées, envahissent l’espace tout entier de la toile, lieu fusionnel du motif et de son environnement, et les sapins exultent dans le foisonnement et l’exubérance de la couleur et de la matière. Dans d’autres toiles, le sapin peut aussi redevenir noir, sombre, inquiétant, brisé, décharné, squelettique. Il se profile alors, vacillant sur des fonds blanchâtres parfois légèrement teintés de bleu ou de vert. Privé de vie et de lumière, c’est le sapin en hiver, image ténébreuse de solitude, de désolation et de mort. Contrepoint.

LE GOÛT DU BLEU
Le goût du bleu s’est installé dans l’esprit de Jean-Pierre Ransonnet lors de diverses rencontres insolites et… de « liaisons dangereuses ». Fascination d’abord, ce qui semble aller de soi, pour le bleu du ciel. Qu’on ne s’y trompe, la séduction ne venait pas du firmament mais du « Bleu du ciel », titre d’un roman de Georges Bataille qui ne parle pas que du bleu du ciel !

C’est aussi lorsqu’enfant, captivé, il assiste au travail de son père, peintre en bâtiment, chargé de repeindre les plafonds de la chapelle de Lierneux où, sur un magnifique fond de ciel azur constellé d’étoiles, trônait une Vierge Marie toute drapée de bleu. Et ce bleu virginal logé dans sa mémoire de se mêler à un autre souvenir, un trouble merveilleux à la vue d’une adolescente dévalant à vélo les rues du village, vêtue d’une mini-jupe bleue flottant sur ses jambes bronzées par le soleil de l’été. Le bleu, c’est encore la flamme rouge, jaune et… bleue de la forge, le bleu limpide de l’étang proche du village, le bleu des myrtilles tapies dans les sapins… « l’ » , elle, Lierneux, les lieux, les liens… enfouis, ressurgis, avoués.
C’est aussi du côté de l’histoire de l’art que Jean-Pierre Ransonnet trouve dans le bleu quelques résonances.
D’emblée, fascination pour le bleu de Matisse, le bleu, intense et lumineux, des paysages de Collioure ou celui, irradiant, presque solaire, des célèbres Nus bleus, papiers découpés peints à la gouache où formes et couleurs ne font plus qu’un. Attirance aussi pour le bleu à la fois expressionniste et idéaliste du groupe « Le Cavalier bleu », fondé par Wassily Kandinsky et Franz Marc. Par l’emploi du bleu, les deux artistes tentent de s’élever au-delà de la matérialité vers le surnaturel, le spirituel. Dans le bleu, Franz Marc fusionne les mondes naturel et animal (le cheval),
reflet de la pureté originelle et, affirme Wassily Kandinsky dans ses écrits(3) : « Plus le bleu est profond, plus il attire l’homme vers l’infini ». Admiration enfin pour Yves Klein qui, quelque cinquante ans plus tard, propose, dans sa volonté d’expérimenter l’idée de l’infini, ses célèbres monochromes bleus. Avec l’aide d’un chimiste, il compose un bleu outremer mat et saturé, absorbant et irradiant la lumière tout à la fois (IKB), « un bleu qui n’a pas de dimension », dit-il, et réalise par là la fusion de la matière et de l’immatériel, de la terre et du ciel, du temps et de l’infini. Soufflant !
(3) Vassily Kandinsky, du spirituel dans l’art et dans la peinture en particulier, 1911.

ET MAINTENANT, « LE FOND EST LÀ, IL S’AGIT DE TROUVER LA FORME » (JPR)
L’Etang est le thème et le titre des premiers tableaux bleus réalisés dans les années ’80. Contre toute
attente, le format de la toile est vertical. L’eau de l’étang n’est donc pas une étendue plane ; elle se
relève frontale et le bleu, d’une telle intensité, n’est ni le bleu de l’eau ni le bleu du ciel, c’est un bleu de cobalt saturé, sourd, mat qui contient et retient la lumière.
Sur les bords du tableau, en bandes verticales, des tracés vigoureux noirs et verdâtres (chemins ou
troncs de sapins qui bordent l’étang) traversent la toile de bas en haut, de la terre au ciel, et l’encadrent sans la refermer. Quelque bris de branches tombées, hérissés de petites barbelures pointues, s’interposent sur les bords inférieurs et supérieurs du tableau ou s’immiscent dans la vaste plage de couleur bleue.
Pas de point focal, pas de sens de lecture si ce n’est celui donné par l’élan vertical. Une composition
frontale, sans profondeur, et pourtant le regard se perd dans l’infiniment bleu. Dans certaines toiles, au cœur de l’abîme apparaît une forme ovale, un visage sans doute, présence humaine mystérieuse dont il ne reste que la trace. Les seuls accords de l’insondable profondeur du bleu et de l’obscurité des noirs intenses, parfois légèrement teintés de brun et de vert terreux semblent de prime abord offrir une vision tragique d’un monde absurde qui porte en soi la disparition, la finitude, la mort. Mais de ce bleu crépusculaire sourd une promesse de lumière, celle de « l’heure bleue », moment éphémère de silence, d’incertitude et d’espoir. Par ailleurs, sorte de masque sans traits ni visage, cette forme ovale saturée de noir, telle une ombre menaçante, surgit d’entre les arbres de la forêt.
Plus tard, dans un tableau de 2009, cette figure noire, écrasée en tache informe, réapparaît sur un bleu nocturne violacé d’une intensité poignante.
Encadrant cette ombre mystérieuse, plus que jamais image de l’absence, quelques éclats de lumière jaune, vert et ocre, cernés de traits noirs incertains semblent prêts à leur tour à s’enfoncer dans la nuit éternelle.
L’étang est aussi le lieu où peut flotter le « l’ » ou, tout aussi énigmatique, une forme carrée quadrillée, noire ou orangée, qui n’est autre que le radeau de son enfance dérivant sur les eaux de l’étang.

LA FORGE BLEUE
Jusqu’à l’aube des années ’90, la peinture de Jean-Pierre Ransonnet parle de l’eau (L’étang), de la terre (Les forêts), de l’air (Les ciels). Des quatre éléments, symbole de l’univers, il lui restait à évoquer le feu. Le symbole allait croiser la réalité. Non loin de la maison natale de l’artiste, travaillait un forgeron — Jean-Pierre Ransonnet raconte qu’il se souvient encore du son du marteau sur l’enclume. La forge, le thème était trouvé. Il réalise alors une série de toiles où les jaunes solaires et les rouges flamboyants servent à inscrire des signes pictographiques, tels des hiéroglyphes, où l’on reconnaît les outils du forgeron, le marteau, l’enclume, la pince, les tenailles. À ce vocabulaire de formes presque abstraites, réduites connue, ombre mystérieuse, visage anonyme, trace évanescente d’une présence humaine.
Très vite, le bleu, les bleus, clair, foncé, violacé, outre-mer, nuit jusqu’au noir, s’accordent aux rouges qui s’effacent progressivement. La forge alors, tout entière, est bleue, d’un bleu incandescent et, trempés dans le bitume, les outils-figures ou figures-outils – la forme est devenue ambivalente – structurent, sans ordre apparent, l’immensité de l’espace.

MANIÈRE DE PEINDRE,
MANIÈRE D’ÊTRE ET DE PENSER
Dès les premiers Ça peint-sapins et jusqu’à ses dernières œuvres, Jean-Pierre Ransonnet, à l’aide de gros pinceaux et brosses, couvre la toile de traits colorés en tous sens. Des pâtes épaisses viennent recouvrir partiellement les couches antérieures plus légères et la matière colorée s’accroche ou coule en fines dégoulinures. Puis, l’artiste tourne la toile sur le côté et la couleur dégouline encore.

Résultat : une sorte de trame, ici sous-jacente là comme en surimpression, se mêle aux motifs et brouille la lecture, accordant par cette pratique une part égale aux quatre bords du tableau. Déconstruction, au final, de la peinture traditionnelle, sans point focal, sans ligne d’horizon, sans ligne de contour, sans dessin, au profit de la liberté de la forme, de la matière pour elle-même et de la notion d’espace et de temps.

« C’EST LE CORPS QUI PENSE » (JPR)
Même si une image vague (« l’ », Lierneux, les lieux, les liens) préexiste, Jean-Pierre Ransonnet aborde la toile sans plan préconçu ; mieux, il organise d’abord le chaos. Dans ce chaos, au gré des hasards et de rencontres fortuites du « geste-forme-couleur », le motif émerge. L’enjeu consiste à le faire exister dans un rapport de forces et de tensions en accord avec le mouvement vibratoire des couleurs. La toile devient un champ d’affrontement ou l’artiste livre un combat au corps à corps avec la matière, les formes et les couleurs. Le geste est puissant, déterminé, sauvage même, émotionnel aussi, voluptueux et sensuel. La forme et l’idée, le corps et l’esprit ne font plus qu’un :
« C’est le corps qui pense », dit-il, et d’ajouter : « L’émotion est mon guide, pas la raison ».
Quoi qu’il en dise, tout son œuvre est sous-tendu par la dialectique des contraires où se rencontrent et fusionnent la lumière et l’obscurité, l’esprit et la matière, le léger et le tragique, la terre et le ciel. Et, comme pour minimiser cette forme de rationalité, Jean-Pierre Ransonnet nous livre son œuvre tout en bleu, d’un bleu si intense, si profond, si luminescent qu’il en devient presque immatériel. Transcendance ?
Mysticisme ? ou … « N’y voir que du bleu »…
Qui sait ?
Anne Gersten

BIBLIOGRAPHIE
 Collectif, Jean-Pierre RANSONNET. Une Biographie, Introduction de Julie BAWIN,
Yellow Now/Côté Arts, Crisnée, 2013.
 Pascale LISMONDE, Le Goût du Bleu, Paris, Mercure de France, 2013.
 Michel PASTOUREAU, Le Bleu. Histoire d’une Couleur, Paris, Seuil, 2000.


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